25 juillet, 2008

Mon Oncle Joseph m’a raconté Drancy et la suite


J’ai trouvé cette photo, qui date de 1945,il avait 16 ans , il a la médaille de la résistance, mais, ça, il ne me l’a pas dit (cliquez sur la photo pour l'agrandir)



Mon Oncle Joseph m’a raconté Drancy et la suite


Récit enregistré le 26 juin 2008 , chez lui, à Cagnes sur Mer


Cela se passait le15 mai 1942

Les Allemands avaient donné une loi comme quoi on pouvait se promener de 3 h à 4h l’après-midi et le matin de 11 h à midi pour faire ses commissions.

J’avais 12 ans et à l’époque, je ne savais pas lire l’heure.

Je sentais qu’il était plus de 4h, j’ai demandé à des passants, sur le pont Marie, s’ils avaient l’heure. Ils m’ont regardé avec un air « les yeux révolvers » (je portais l’étoile). Et m’ont répondu : Sale juif, tu aurais du être rentré depuis au moins ½ heure.

A proximité, il y avait 2 gardiens de la paix, ils ont entendu, se sont approchés, il y a eu un petit attroupement.

Un passant a dit "Oui, ce petit youd, il devrait être chez lui."

J’ai répondu aux agents : Je m’excuse, je ne sais pas lire l’heure, je n’ai pas de montre, j’ai demandé quelle heure il était, et ça a fait un scandale.

Les deux agents m’ont dit : tu vas venir avec nous au dépôt

J’ai répondu : il faut que je prévienne mes parents

Ils m’ont répondu : ne t’inquiètes pas, tes parents seront prévenus, n’aie pas peur

Ils m’ont emmené au dépôt du commissariat du 4è arrondissement et de là, ils sont venus me chercher et m’ont emmené à Drancy

Pendant mon séjour à Drancy, tous les jours à 6h du matin et du soir, on faisait l’appel.

Les Kapos venaient toujours par derrière..

Un jour, j’ai oublié d’enlever mon béret, j’ai reçu une de ces claques sur l’oreille droite qui m’a mis K.O, personne n’avait le droit de me relever. On m’a laissé inanimé par terre

Quand l’appel a été terminé, on était libre, on m’a ramassé, les kapos m’ont envoyé au dispensaire qui soignait les enfants. (Les J2)

2 jours après, mon oreille a commencé à suinter, il y avait beaucoup de pus

Le chef infirmier (il avait 3 assistantes) a mis une poudre pour localiser l’infection,

Mon oreille était complètement bouchée, une infirmière l’a nettoyée avec de l’eau bouillante et de l’alcool à 90, j’ai hurlé

Avec de la gaze, il a fait des mèches, qu’il fallait changer tous les jours, ça coulait..

Et à la base du crâne, de l’oreille droite, ça commençait à s’étrangler à cause du pus

Le chef infirmier a appris, par le nouveau décret, que j’allais être relâché, il m’a dit : dès que tu sors, tu vas à l’hôpital voir un oto-rhino.

J’y suis resté 5 mois et demi, du 15 mai au 1er novembre 1942

J’ai été relâché, parce que le maréchal Pétain a écrit une lettre à la Kommandantur du quartier de l’Opéra, comme quoi, il fallait relâcher tous les enfants âgés de 12 à 16 ans qui ont été arrêtés avant la rafle du Vel d’Hiv (16juillet 42)

Je suis retourné à pieds chez mes parents rue des Deux Ponts, ils avaient appris que j’avais été arrêté, c’est ma soeur Anna qui m’a emmené à l’hôpital Rothschild.

Ils ont décidé de m’opérer de la mastoïdite, mais ils m’ont opéré de l’évidement du pus et m’ont mis des mèches. Pendant 6 mois, ça a continué à couler.

Puis je suis parti me cacher dans l’Oise, à Noyon. Il ne fallait dire à personne où on était.

Ce sont des relations non juives qui m’ont aidé

Ensuite, je suis parti dans la Nièvre, je suis entré dans la résistance, j’avais 13 ans et demi. Puis à Dijon, (dans la campagne) jusqu’à la libération

J’ai travaillé dans une ferme, je m’occupais des 2 vaches, la fermière avait 70 ans et avait besoin d’aide, elle avait des rhumatismes aux mains. Ils avaient beaucoup de terrain, en échange des chevaux d’un voisin, j’allais travailler chez eux.

A la libération, je suis rentré chez moi


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